samedi 17 octobre 2020

Les vins intenses du chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle en Espagne

 

Une communication de Jean Luc Binet 

notre Marcheur, pèlerin Œnologue 


Article transmis par Robert Desbureaux

Les vins intenses du chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle en Espagne

Depuis des siècles, ceux qui empruntent le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle sont en quête de paix, de nature, de spiritualité ou d'histoire. Mais dans le nord de l'Espagne, il se double d'une route des vins. Nous la parcourons d'El Bierzo en Castille-et-Léon jusqu'aux vignobles de la Ribera Sacra et des Rías Baixas en Galice pour découvrir trois des huit appellations que l'on trouve entre Saint-Jean-Pied-de-Port et Saint-Jacques-de-Compostelle.

Au Moyen Âge, ce sont les monastères qui sur place, perpétuaient la tradition viticole apportée par les Romains. Des variétés de cépage et des méthodes d'élaboration du vin remonteraient à cette époque.

"Mes vins sont le reflet de toute mon énergie"

Au Bierzo, Raúl Pérez est l'un des œnologues les plus connus au monde. Le chemin de Saint-Jacques a un sens particulier pour lui. Il a appelé son premier vin "Ultreia", le terme utilisé par les pèlerins pour se saluer.

"Je n'avais rien quand je me suis lancé dans la production de vin ; tous les jours, je progressais pas à pas et ça me faisait penser aux gens qui empruntent le chemin et qui trouvent la force d'arriver au bout : cette vision du chemin et de ces gens m'a beaucoup aidé," indique Raúl Pérez, viticulteur de la Bodega qui porte son nom. "Le mot Ultreia fait référence à cette ténacité, à ce courage qu'il faut avoir pour continuer," dit-il.

Raúl Pérez travaille en harmonie avec la nature en veillant à la laisser s'exprimer. Sa priorité, c'est d'avoir le moins d'influence possible sur les raisins avant d'en faire des vins emplis d'élégance et d'innovation.

"Je veux être original, créer ma propre interprétation du vin : c'est quelque chose qui me passionne énormément parce que mes vins sont le reflet de toute mon énergie," insiste le vigneron. Son énergie et ses efforts l'ont poussé vers les sommets. Plus de 200 de ses vins apparaissent dans la liste de la prestigieuse revue "Wine Advocate" de Robert Parker.

"Faire des vins plus frais et respecter la terre"

À quatre jours de marche du Bierzo, nous arrivons dans les gorges abruptes de la région de la Ribera Sacra. Les vignes étant parfois placées sur des terrasses presque verticales, les vendanges font partie des plus périlleuses au monde.

Chaque parcelle donne une caractéristique particulière aux raisins qui s'y épanouissent. La technique compte, mais le terroir et la nature jouent pleinement leur rôle.

Produire du vin sur place nécessite courage et attachement à la tradition. Des qualités que Pedro Manuel Rodríguez cultive. Ce descendant d'une longue lignée de viticulteurs a redécouvert les techniques anciennes. "Dans ce tonneau, on fait du vin d'un domaine ancien de manière traditionnelle, avec les grappes entières," nous montre Pedro Manuel Rodríguez, de la Bodega Guímaro.

La vinification se fait avec les tiges et la fermentation, avec les levures naturellement présentes sur les raisins. Mais l'une des méthodes ancestrales les plus emblématiques, c'est probablement le foulage au pied.

Le nom du domaine "Guímaro" signifie "rebelle" en galicien. C'est le surnom de la famille. Mais il correspond aussi à ces viticulteurs espagnols qui ont fait évoluer leur métier et se sont fait un nom au plan international. "On a tous commencé à faire des vins différents de ceux qu'on faisait avant en Espagne : on a voulu faire des vins plus frais, plus agréables et plus faciles à boire, mais aussi mieux respecter la terre et les variétés de cépages que l'on fait pousser," précise le viticulteur.

Le cépage Albariño, trésor des Rías Baixas

La plupart des vins rouges produits sur place comme au Bierzo sont élaborés à partir du cépage Mencía. Mais les autres variétés galiciennes comme le Merenzao ou le Sousón ont été réintroduites pour produire des vins frais et intenses.

Dans la région des Rías Baixas, le cépage Albariño est présent partout. Les vignes poussent en hauteur sur des treillages.

La viticultrice Vicky Mareque nous montre une parcelle prête à être vendangée. "Les raisins sont petits, dorés et très compacts avec beaucoup de pépins et une peau épaisse ; la maturité est optimale pour vendanger," décrit-elle.

Son vignoble de Pazo de Señorans est rattaché à un manoir du XVIe siècle acquis par les parents de Vicky Mareque. Il y a trente ans, sa mère a démarré la production de vin et œuvré à la création de l'appellation "Rías Baixas". Le cépage Albariño est le trésor de ce terroir.

"Cette variété est un joyau : elle a le bon équilibre entre le degré d'alcool et l'acidité," affirme Vicky Mareque. "Ce qui nous permet de produire de nombreux vins différents : ils sont élaborés à 100% avec une seule variété, c'est remarquable," insiste-t-elle. "Plus on améliore l'Albariño, plus il aura de chances de devenir l'un des meilleurs cépages blancs au monde," assure-t-elle.

Qui a dit que les vins blancs devaient être bus jeunes ? Ce vignoble a aussi montré au monde que le cépage Albariño leur donnait une plus grande longévité.

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